Voilà, comme promis, dans un des Reels du tour des îles du Ponant, voici le retour d’expérience que je vous raconte, suite au passage de 3 cellules orageuses pendant ma traversée Les Glénans/Audierne en solo sur un Kelt 760.

Alors je ne suis pas là pour vous dire ce que vous avez à faire, car trop de paramètres diffèrent d’un bateau à l’autre, mais simplement ce que j’ai vécu et ressenti sur le moment présent. Si ce récit peut servir à quelques réflexions, tant mieux !😉

Le début de la navigation était magnifique,  j’ai quitté les Glénans un peu avant 8h, direction Audierne avec 10-13 nœuds de vent, forcissant 15 nœuds en après-midi, ciel bleu…

Sur le bulletin Météo-France des risques d’orages entre Penmarch et l’anse de l’Aiguillon, donc pas de soucis, la zone est large et je m’éloigne de Penmarch, faisant route vers Audierne…sauf que !

Au fur et à mesure de la navigation, le temps change, mais le vent reste sud-est, me portant, voile en ciseau, génois tangonné, entre 5 et 6,5 nœuds, le bonheur !

Vers 13h, je vois une belle cellule orageuse qui passe derrière moi sur la pointe de Penmarch, assez active, bruyante même avec de bons grains, mais assez loin, 4 à 5 milles dans mon tableau arrière, arrivant depuis le sud-ouest alors que le vent pour moi est sud-est! Le ciel n’étant toujours pas engageant, mais pas inquiétant non plus, je jette un œil sur Windy, en mode orage et je vois que j’ai une barre qui m’arrive dessus avec 3 cellules bien actives !

Je prends la décision de sauter l’étape d’Audierne pour aller le plus à l’ouest possible et m’éloigner de la zone perturbée, si je suis pris dans l’orage, je préfère avoir de l’espace, ne pas être trop près de la côte !

Là, j’avais 4 milles d’espaces, pour mettre en fuite, si besoin, pour l’instant le vent est tombé , je rentre le génois et je file plein ouest, au moteur à près de 4 nœuds (très gros moteur !!).

Une deuxième cellule se forme par mon travers et là je commence vraiment à flipper. Elle est impressionnante, très active et à la forme d’un gros cylindre pas rassurant du tout, mais elle à l’air de suivre sa copine et passer dans mon tableau arrière, ce qui m’arrange, car être le seul mât en alu dans ce néant, c’était le coup de jus annoncé !!

Finalement, je file toujours plein ouest, sous grand-voile seule et moteur, car la marée me profite pour passer le raz de sein et bizarrement, c’est le seul échappatoire. La deuxième cellule me croise par le bâbord tranquillement, zéro vent, j’en profite pour m’alimenter dans le cockpit, le bateau sous pilote, pour l’instant mon but est toujours de prendre de l’ouest pour me faufiler entre la deuxième et la troisième cellule qui semble se diriger sur le Raz de Sein.

Je n’ai pas fini ma salade que je vois ma girouette qui s’affole, et les cordages qui sifflent!

Le vent est monté d’un coup à plus de 20 nœuds et en sortant la tête je vois que la deuxième cellule semble se diriger sur moi !

Je décide de faire cap au vent et d’affaler la grand-voile, car je sens que le vent forcit, et sous un orage, on ne sait jamais le vent qu’on va trouver !!

J’affale et je commence à fixer la grand-voile avec un tender pour éviter qu’elle ne parte en vrac et décide de mettre le taud pour assurer le coup, le vent continue de monter et la mise en place du taud deviens compliqué le bateau ne gardant pas son cap (sous pilote), se met de travers et la je flirte avec les 30 degrés de gîte accroché au mât…

Heureusement, il passe vent arrière, car le pilote tient la barre à fond sur bâbord, du coup je peux revenir au cockpit. Quand je finis la manœuvre, la mer est blanche et l’anémomètre s’affole à plus de 30-35 nœuds, peut être même plus de 40, mais je m’occupe de tout sécurisé et fait route à l’inverse de ma route qui est mon dernier souci pour l’instant !

Je rentre dans le roof et je me change en salopette, veste de quart, gilet de sauvetage et longe pour ressortir puis fermer le roof pour éviter d’embarquer trop d’eau si la mer se forme.

Je repositionne le pilote pour faire face et la pluie commence à tomber fort, progressivement il se met de travers et je prends la barre en faisant bien attention de ne pas toucher de métal …

Je me prends des éclaires, des grondements et des litres d’eau pendant 5 minutes avec un bon vent de 40 nœuds, une mer blanche et quasiment plate et j’avance en crabe toujours dans l’idée de contourner la dépression par l’ouest…

Au bout d’une dizaine de minutes, le vent redescend à 30 nœuds et j’ai presque l’impression que c’est plus calme, plus clair, le vent continue de descendre progressivement à 15 nœuds voir 10 nœuds et le temps se calme.

L’orage est passé sur Audierne et la troisième cellule passe dans le ras de sein et dernière, je vérifie sur l’application que c’est la fin de l’orage, il n’y en a pas d’autres pour l’instant en prévision, l’orage est passé et moi je suis rincé dans tous les sens du terme.

Je me contente de cette option ouest qui m’a permis d’éviter le cœur de la cellule, je n’ai été que sur le bord tribord de l’orage évitant, en partie, de plus gros problèmes.

Le fait d’avoir sécurisé la grand-voile m’a permis de faire face aux vents sans trop d’appréhension, le plus risqué a été d’aller installer le taud de grand-voile au pied de mât, mais une fois fait, c’était beaucoup plus sécurisant.

Le plus surprenant dans un orage, c’est que tout va très rapidement, 15 à 40 nœuds en moins de cinq minutes, le fait de ne pas avoir de côte à moins de 4 milles nautiques m’a permis aussi d’être serein, le seul vrai anxiété était les éclairs, mais là on est sur un coup de poker (avec des dés pipés quand même)!!

Il faut vraiment anticiper, affaler et sécuriser les voiles et se préparer à faire face ou à partir en fuite, donc avoir une ancre flottante au besoin, ce que je n’avais pas !

Après, dans l’orage, au moment le plus chaud, c’est à la fois effrayant, beau, impressionnant, fascinant et on prend un bon coup d’humilité face aux éléments.

J’arriverais à Camaret vers 22 h après 14 h de navigation…

https://www.instagram.com/reel/Ci__wgCjQVq/?igshid=MDJmNzVkMjY=

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